Hors des sentiers battus avec Marc – Mars 2019

Petit bonhomme de chemin

par Marc Chapleau

Marc Chapleau

Marc Chapleau

Une lapalissade, pour commencer : tout change très vite, aujourd’hui, le neuf n’en finit plus de pousser sur le vieux et allez, tasse-toi, mon oncle.

Dans le vin maintenant, ça a changé aussi ?

Par rapport à 1985, tiens, année de référence à mes yeux puisque j’assumais alors, à 28 ans bien sonnés, le poste de rédacteur en chef du magazine Vins & Vignes, fondé par un groupe de passionnés.

L’époque de MS-DOS, des disquettes cinq pouces et quart souples, du bruit – tsidong-tsidong-tsidong – que le modem faisait quand la connexion s’établissait.

Après, rapidement – je saute sûrement des étapes –, il y eut l’Internet généralisé, les courriels et les fichiers Excel.

À travers tout ça, tous les deux ou trois ans, débarque un gadget censé révolutionner notre rapport au vin. Des exemples : la clé du vin, l’entonnoir à effet venturi, la carafe bionique et autres accélérateurs de particules patentés…

Autant de raccourcis censés nous faciliter la vie et nous épargner le moindre effort.

En toute justice, cette folie des glandeurs souffre toutefois quelques exceptions. À commencer par le bouchon AntiOx, qui marche vraiment, je l’ai testé à maintes reprises, et le système Coravin, pas du tout un tour de passe-passe lui non plus, qui permet de conserver des vins entamés durant plusieurs mois.

Autrement, retour au jeu de la comparaison, on déguste en 2019 pas mal comme on le faisait en 1985.

La différence, en ce qui me concerne du moins, c’est que je goûte le plus souvent avec mon ordinateur devant moi, en entrant mes notes au fur et à mesure, m’évitant ainsi la retranscription.

Autre changement, qui s’applique sauf erreur à tout le monde, le vocabulaire.

Entre autres exemples, on dit rarement aujourd’hui qu’un vin est nerveux ou vif ; tendu est devenu le maître mot pour connoter l’acidité.

Parfois cependant, l’ensemble manque de ressort et il se trouve à y avoir un certain jeu dans la poulie, comme on dit. À d’autres moments, par contre, le vin est acidulé et tendu à souhait, comme un string – un spring, pardon.

Quoi d’autre ? Eh bien, on détaille de nos jours moins les odeurs, de manière générale, et on s’attarde beaucoup à la texture du vin, au toucher de bouche comme disent parfois les Français, nous donnant ainsi de nouveau l’occasion de gentiment moquer leur parler.

Pour le reste, business as usual.

Il suffit toujours d’un palais affûté, d’une bonne dose de rigueur et d’un minimum de suite dans les idées pour continuer à faire son chemin dans le merveilleux monde du vin.

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À BOIRE, AUBERGISTE !

Soif, tu dis ? Palabrer, c’est bien connu, cela t’assèche un gosier ? C’est bien pour ça que j’ai ouvert à l’instant mon ordi, repassé mes dernières notes et extrait plusieurs bonnes bouteilles, pour garnir votre table ou votre cellier. Lisez jusqu’au bout, je les ai classées dans le désordre (!), couleurs et prix mélangés.

Paul Mas Crémant De Limoux Brut   – Un poil brioché, ce mousseux, peut-être un ou deux grammes de résiduel de trop, mais broutilles que cela, le vin est excellent, savoureux et rafraîchissant. Finale sur l’olive verte. À ne pas manquer ! [20 $]

Oveja Blanca Dry Muscat Joven 2016 – Savoureux muscat du centre de l’Espagne (Cuenca, entre Madrid et Valence), riche et parfumé sans lourdeur, même assez nerveux, et marqué par une finale anisée. Alcool en bride (13,5 %), du sucre un peu (6,8 g), mais l’impression de fraîcheur est là. [16,80 $]

Domaine Mourgues Du Grès Terre d’Argence 2016 – Excellent blanc bio du sud de la France (près de Nîmes), riche et parfumé, très bien soutenu par son acidité, impression de rondeur et de fraîcheur à la fois. À table, sur des fruits de mer ou des moules, se débrouillera très bien. [24,20 $]

Burg Ravensburg Riesling 2016 – Admirable riesling allemand bio, du pays de Bade, typé (odeurs de limette et de conifère), nerveux et fruité, légèrement sucré (un peu plus de 7 g) sans trop perdre en vivacité. Prix attractif. [21 $]

Paul Mas Crémant De Limoux Oveja Blanca Dry Muscat Joven 2016 Domaine Mourgues Du Grès Terre d'Argence 2016 Burg Ravensburg Riesling 2016

Couly Dutheil Les Moulins De Turquant 2017 – Très bon blanc de la Loire d’appellation saumur, à base de chenin blanc, nerveux et fruité, miellé aussi, avec un sucre résiduel à 5 g, qu’on sent, c’est de fait légèrement sucré mais sans lourdeur aucune. [19,70 $]

El Bonhomme 2017 – Un sans-faute, jusqu’ici, pour la Québéco-Espagnole Nathalie Bonhomme, et ça se poursuit avec ce rouge 2017, à la fois généreux et tendu, avec une tonifiante acidité. Une affaire ! [18,75 $]

Domaine Clavel Les Garrigues 2016 – Excellent rouge bio en appellation d’origine protégée Languedoc, fruité et minéral à la fois, épicé également, à peine corsé, tendu, l’acidité est notable et bienvenue, grande fraîcheur conjuguée à la générosité. À plus ou moins 22 $, on ne se trompe pas.

 

Couly Dutheil Les Moulins De Turquant 2017 El Bonhomme 2017 Domaine Clavel Les Garrigues 2016

Domaine Des Hauts Baigneux Spontané Blanc 2017 – Convaincant mousseux blanc bio de Loire, étonnamment à base de cépages bordelais (sémillon) et du sud-ouest (len de l’el, mauzac), bien sec, léger, vif et tendu, avec une attrayante note briochée. Il s’agirait d’un pétillant naturel – un «pet’nat’». [24,50 $]

Domaine Fouassier Le Clos De Bannon 2017 – Très bon sancerre produit en biodynamie, peu sauvignonné et peu marqué par le buis (on s’en réjouit), plutôt marqué par le fruit tropical, avec en bouche une belle texture suave, cependant que la tension, l’acidité, est bel et bien là. Vaut tout à fait son prix, à un peu plus de 31 $.

Famille Hugel Riesling 2016 – Bon rapport qualité-prix que ce riesling de la réputée maison Hugel, plus marqué par les notes de conifère que par celles de fruit, le vin n’en est pas moins attrayant, nerveux, bourré de fraîcheur malgré la pointe de résiduel (un peu moins de 5 g). [18 $]

Domaine Des Hauts Baigneux Spontané Blanc 2017 Domaine Fouassier Le Clos De Bannon 2017 Famille Hugel Riesling 2016

Domaine Comte Senard Bourgogne Rouge Auguste 2016 – Dans un style relativement léger et acidulé, un excellent bourgogne générique, aux saveurs relativement profondes et à la finale bien persistante. Pas donné, à 34 $, mais la qualité y est !

Ten Sisters Pinot Noir 2015 – Estimable rouge de Nouvelle-Zélande, fruité et épicé, avec une acidité volatile assez marquée qui lui donne un surcroît de fraîcheur. Bien typé par ailleurs, et bien sec aussi.
[25 $]

Château Rouquette Sur Mer Cuvée Amarante 2015 – Toujours aussi fiable, ce rouge languedocien tout en charme et en fruit, sans être très concentré. Impression de fraîcheur en finale, par ailleurs épicée. À moins de 20 $, un très bon rapport qualité-prix, encore et toujours.

Domaine Comte Senard Bourgogne Rouge Auguste 2016 Ten Sisters Pinot Noir 2015 Château Rouquette Sur Mer Cuvée Amarante 2015

Marc

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