La Nouvelle-Zélande et ses pinots noirs

Hors des sentiers battus
par Marc Chapleau

Marc Chapleau

Marc Chapleau

Bon, un petit quiz pour commencer. Nouvelle-Zélande rime avec… ?

La trilogie du Seigneur des Anneaux, oui, d’accord, puisque plusieurs scènes ont été tournées dans l’île du Sud et notamment dans Central Otago. Mais encore ? Vrai, toujours, le pays rime avec kiwis (le surnom de ses habitants, en passant) et aussi avec leurs fameux agneaux (moins cher que celui élevé ici et pratiquement aussi bon).

Cela dit, et en ce qui nous concerne plus spécifiquement, la Nouvelle-Zélande rime surtout avec vin… de sauvignon blanc.

Ah, le subtil arôme d’asperge. Ah, l’envoûtante odeur de pamplemousse ici, de piment Jalapeño là. Je blague, à moitié. Car le sauvignon blanc de nos lointains amis est à la fois le bien-aimé voire le chouchou du public, et le mal-aimé, le souffre-douleur, d’assez nombreux critiques.

La popularité en général de ce cépage est d’ailleurs telle qu’encore aujourd’hui, il accapare environ 70 % de toute la production viticole néo-zélandaise.

Le Pinot noir bon deuxième

Même s’il est très loin derrière, représentant 9 % de la production de vin dans le pays, le pinot noir devient peu à peu la nouvelle vedette. Et cette fois, tant le public que les spécialistes s’accordent à lui trouver des qualités. Sans compter, au Québec, la Société des alcools, qui en fait la promotion ces jours-ci. Même qu’on y trouve en ce moment un peu plus de pinot noir (43) que de sauvignon blanc (37) !

New Zealand

Cet engouement tant chez nous que là-bas n’a rien à voir avec le fait que le pinot noir serait, par exemple, facile à cultiver – bien au contraire, comme on sait. La viticultrice Siobán Harnett, longtemps chez Cloudy Bay et aujourd’hui en poste chez Whitehaven, avait ainsi coutume de dire : « Le pinot noir est un cépage difficile et capricieux. Quand il mûrit, c’est comme pour les oeufs brouillés : pas encore prêt, ça s’en vient, hmm… c’est presque cuit… merde ! trop cuit ! »

Un des vins les plus polyvalents

J’oserais pour ma part avancer que l’un des atouts-clés du pinot noir de Nouvelle-Zélande, c’est sa polyvalence. Le fait qu’il s’accorde, à table, à une multitude de plats, des viandes aux fromages en passant par la cuisine de type asiatique, même épicée et même aigre-douce.

Peu tannique, à l’acidité élevée et avec, souvent, un restant de gaz carbonique qui avive ses saveurs, je vois effectivement peu d’autres vins, à part le rosé, qui puissent être aussi passe-partout.

La grande majorité des pinots noirs de Nouvelle-Zélande viennent de l’île du Sud et, pour l’essentiel, de la région de Marlborough. Mais au sud de ce Sud, dans Central Otago, le cépage d’origine bourguignonne, qui compte dans ce dernier secteur pour près de 71 % de la surface plantée en vignes, se fait de plus en plus remarquer.

Parmi les meilleurs

J’ai goûté récemment une quinzaine de pinots noirs de Nouvelle-Zélande. S’il est vrai qu’ils sont nombreux à se ressembler, à sentir et à goûter en gros la même chose, en revanche certains ressortent du lot. Voici ceux que j’ai retenus.

À tout seigneur tout honneur, le Dog Point Vineyard 2011 est superbe, avec sa texture serrée et sa minéralité qui rappellent bien des bourgognes vendus plus chers.

Également très bon, un peu plus boisé peut-être mais harmonieux et bien fruité par ailleurs, l’Astrolabe 2011.

Pour sa part, le pinot noir Whitehaven 2011, une maison appartenant au géant californien Gallo, doit sûrement une partie de sa relative élégance et de sa nervosité aux bons soins de la viticultrice dont je parlais tantôt, Sioban Harnett.

Dog Point Vineyard Pinot Noir 2011 Astrolabe Marlborough Province Pinot Noir 2011 Whitehaven Pinot Noir 2011 Saint Clair Pioneer Block 15 2010 Margrain Vineyards Home Block Pinot Noir 2010 Framingham Wine Company Limited

Dans Marlborough, Saint-Clair Family Estate produit une série de beaux pinots noirs dont le Pioneer Block 15, charnu et persistant, qui gagne à prendre quelques années de bouteille – même si, c’est vrai, ça ne vieillit pas rapidement sous capsule dévissable…

À Martinborough cette fois, dans l’île du Nord et pas très loin de la capitale, Wellington, Margrain propose un très bon pinot, encore une fois assez boisé mais très bien soutenu par l’acidité.

Pour terminer, on traverse de nouveau le détroit de Cook pour revenir dans l’île du Sud et à Marlborough, avec le pinot noir Framingham 2012, dans un style qui n’est pas sans rappeler celui de Margrain tout juste mentionné.

Une expérience intéressante

Une anecdote, avant de vous quitter. En fait, une expérience intéressante à laquelle j’avais été convié chez le producteur Felton Road, voilà quelques années : deux Pinot Noir « Block 3 » âgés de quatre ans et goûtés côte à côte, l’un bouché sous vis, l’autre sous liège. Mêmes conditions de conservation, même millésime. Le screw-cap l’a emporté, son fruit était plus éclatant, encore « jeune », mais par une faible marge puisque l’échantillon bouché liège, à défaut de fraîcheur aromatique, avait par contre plus de rondeur, son acidité s’était agréablement atténuée.

Santé !

Marc

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