Les choix de Nadia – Juillet 2015

Les classiques et les autres
par Nadia Fournier

Nadia Fournier - New - Cropped

Nadia Fournier

Au moment où je vous écris, j’en suis à plancher sur les premières sections du Guide du vin 2016, dont on célèbre cette année la 35e édition! Comme chaque année à cette période, je me questionne. Pourquoi écrire et surtout, pour qui ? Qu’est ce qui intéresse les lecteurs ? Y a t-il des mots, parmi les descriptifs utilisés, qui leur parlent davantage, d’autres qui les laissent songeurs ?

En début d’année, un lecteur m’avait suggéré d’abandonner le terme vineux, pour définir un vin blanc gras. « Trop archaïque et redondant » à ce qu’il paraît. J’ai choisi d’écouter son conseil. Il n’a pas tort après tout.

L’année dernière, c’était le mot « fraîcheur » qui revenait trop souvent aux dires d’un autre fidèle du guide. Plutôt bon signe, non ? C’est déjà mieux que lourdeur. J’ai tout de même tenté de corriger le tir et de substifuer le « F word » par quelques synonymes, quitte à changer les tournures de phrases. Ça fait toujours du bien de se renouveler.

Puis, la semaine dernière, j’ai reçu un message d’une lectrice assidue qui me laisse encore dubitative. Sur un ton très courtois, elle (appelons la Madame P.) questionnait l’emploi des expressions « moderne » et « classique ». Deux termes largement utilisés dans le jargon des chroniqueurs en vin, mais qui, au fond, ne veulent rien dire pour elle.

Commençons donc par la modernité. Qu’est ce qu’un vin moderne ? Mis à part quelques rares traditionnalistes et adeptes du mouvement « nature », presque tous les vins produits aujourd’hui ne devraient-ils pas être qualifiés ainsi, étant donné qu’ils bénificient de connaissances œnologiques modernes et de technologies de pointe ? Peut-être bien, sauf que pour les chroniqueurs, le terme « moderne » réfère davantage au style de vin, qu’à la méthode. De manière générale donc, un vin moderne présentera un taux d’alcool plus élevé que la moyenne, un fruit très mûr, une acidité modérée, des tanins ronds et des parfums boisés marqués.

En fait, portés à l’extrême, les vins modernes tendent à se ressembler au point où il devient difficile de déterminer leur région d’origine. Des vins puissants, lourds, gommeux et boisés qui pourraient venir d’à peu près n’importe où sur la planète.

À l’opposé, les classiques portent clairement la marque de leur lieu de naissance. Des vins très typés de leur origine, soit par leurs arômes, soit par leur texture, leur grain tannique particulier, leur vivacité, leur fermeté, leur souplesse. Vous savez, ce genre de vin sur lequel on rêve de tomber dans une dégustation à l’aveugle? On plonge le nez dans le verre, on ferme les yeux et on sait tout de suite. (Remarquez, on se fait aussi avoir parfois, souvent même).

Pour vous illustrer la chose, voici quelques bons vins goûtés cette semaine. Cabernets chiliens, bonarda argentine, quelques sauvignons blancs d’horizons divers et d’autres vins qui, à leur manière, sont autant de classiques de leurs régions d’origine.

Et merci Madame P. ! C’est toute une chance de pouvoir écrire pour des amateurs de vins aussi curieux, pour des lecteurs aussi allumés!

À la vôtre!

Revisiter le cabernet chilien

Carmen Gran Reserva Cabernet Sauvignon 2012

Cousiño Macul Antiguas Reservas Cabernet Sauvignon 2012

Clos des Fous Cabernet sauvignon 2011, Grillos CantoresClos Des Fous Cabernet Sauvignon 2011 (21,65 $)
Ce vin m’a réconciliée avec le cabernet au Chili. Le 2011 est mis en valeur par un usage intelligent de la barrique et présente la droiture tannique propre au cépage; beaucoup de tonus et aucun excès de concentration. Autant de vertus qui le rendent très agréable à boire.

Cousino-Macul Cabernet sauvignon 2012 Antiguas Reservas (18,95 $)
Ce cabernet serait plutôt un contre-exemple en matière de classique chilien. Jadis d’inspiration très européenne, ce domaine de Maipo a entrepris un virage moderne il y a une bonne dizaine d’années. Résultat : plus d’alcool – les vins sont passés de 12,5 % à 14 % d’alcool – de puissance et de rondeur, au détriment de la « buvabilité ». Flatteur, mais un peu lourd.

Carmen Cabernet sauvignon 2012, Gran Reserva, Maipo Alto (18,75 $)
En plus de très bons vins blancs vendus à la SAQ (à des prix d’aubaine), l’œnologue Sebastien Labbe façonne ce cabernet d’envergure dans les hauteurs de Maipo. Moins de bois neuf que par le passé, une très belle qualité de fruit, qui s’appuie sur un tissu tannique dense et bien mûr. Dégusté sur deux jours, le vin était nettement meilleur le lendemain. La carafe s’impose.

D’agrumes et d’asperges 

Clos Henri Petit Clos Sauvignon Blanc 2014

Errazuriz Fumé Blanc 2014

Caliterra, Sauvignon blanc 2014, TributoCaliterra Tributo Single Vineyard Sauvignon Blanc 2014 (16,95 $)
Installée dans Colchagua, l’entreprise Caliterra appartient à Eduardo Chadwick, aussi propriétaire de Errazuriz. Bon Sauvignon typiquement chilien, tant par sa vivacité, que par ses parfums d’asperges vertes et d’agrumes.

Errazuriz, Fumé blanc 2014 Estate Series (14,95 $)
Issu d’un assemblage de sauvignon blanc provenant de deux différentes régions : Casablanca et Aconcagua Costa. Vif, débordant de vitalité et très charmant avec son nez d’agrumes et de piments jalapeño.

Clos Henri, Sauvignon blanc 2014, Petit Clos (19,65 $)
Le style des vins produits à Marlborough par le Français Jean-Marie Bourgeois et ses fils me semble plus précis depuis un an ou deux. En 2014, le Petit Clos est impeccable. Beaucoup de plaisir à moins de 20 $.  

D’autres classiques 

Raventos I Blanc L'hereu Conca Del Riu 2012

E. Guigal Crozes Hermitage 2011

Nieto Senetiner, Bonarda 2014, BenjaminBenjamin Nieto Senetiner Bonarda 2014 (11 $)
Bon vin de soif à la mode argentine, en ce qu’il met en valeur toute la souplesse et les bons goûts fruités du cépage bonarda. Encore meilleur servi frais autour de 14-15°C.

Guigal, Crozes-Hermitage 2011 (27 $)
Un Crozes assez représentatif de son appellation, facilement reconnaissable à ses parfums fumés et ses tonalités animales. Un peu de réduction à l’ouverture, ce qui s’estompe après une demi-heure en carafe. À boire d’ici 2017.

J Raventos i Blanc, l’Hereu 2012, Conca Del Riu (20,65 $)
Même s’ils ne font plus partie de l’appellation Cava, les vins de Pepe Raventos demeurent parmi les meilleures références en la matière. Comme toujours, un très bon achat à 20 $!

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